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Quelques heures avant l’attribution de sa 3ème étoile, le célèbre chef Paskal Jankovski disparait avec son second lors d’une partie de chasse. A 20 ans, sa fille Clara se retrouve seule aux commandes du restaurant. Deux ans plus tard, elle reçoit une mystérieuse invitation pour Taïwan…
Votre film porte le titre de La Réparation, conséquence de la disparition de deux de ses personnages. Pourquoi le thème de la disparition vous intéresse-t-il ?
À travers un événement, la disparition d’un membre d’une famille que je connaissais de longue date. J’ai été témoin de la « nouvelle existence » de cette famille. Où chacun a sa propre réaction : certains conservent le besoin aigu de savoir, de comprendre, d’autres se coulent lentement dans le doute et l’énigme, les préférant à la certitude d’un drame ou d’une conclusion définitive.
Dix mille personnes disparaissent sans laisser de traces chaque année en France. Et on en parle peu, c’est comme un secret, inavouable. Ces réflexions ont constitué le point de départ de l’écriture du scénario.
Pourquoi avoir choisi un personnage féminin, Clara, comme thème central de La Réparation ?
Quand je pense aux personnages qui ont marqué mes débuts de spectateur dans les salles de cinéma, les figures féminines s’imposent, telles Brigitte Bardot dans Le Mépris, Eva-Marie Saint dans La mort aux trousses, et tant d’autres…
Clara est effectivement le point de départ et le personnage central de La Réparation. Elle traverse cet âge, fragile et ardent, de la délivrance. Un passage obligé, une traversée, qui requièrent toute son énergie.
Mais rien ne l’a préparée à ce coup de tonnerre, la disparition de son père et de son amant. Ni à affronter les événements qui en découlent et viennent chambouler sa vie.
Quel lien unit ce chef gastronomique à sa fille ?
Depuis le départ de sa femme, Paskal a reporté toute son affection et son amour sur sa fille. Il la croit capable de grandes choses même si elle n’a pas encore fait ses preuves. Et Clara se retrouve seule avec, sur les bras, un restaurant en pleine lumière, au sein d’une équipe qui ne la légitime pas. Or, plus ce personnage était fragile, ou en danger, plus il me semblait intéressant.
La Réparation aborde plusieurs genres cinématographiques, à la fois thriller, film d’enquête, film romanesque, film de voyage… Qu’est-ce qui a présidé à ces choix ?
J’ai développé l’intrigue, les personnages, sans viser de coller à un genre défini, j’ai laissé les portes ouvertes, au gré des sentiments, des sensations.
La gastronomie s’est imposée comme fil rouge, à travers le goût surtout. Le goût est par essence un voyage, il peut devenir un partage. Et j’ai imaginé alors que la piste empruntée pour l’enquête serait celle de la mémoire des saveurs et du goût.
Il est donc difficile d’enfermer le film dans une case. Cette histoire est comme nos existences, multiple. Peut-être l’élément dominant est la transmission, entre un père et sa fille…
La Réparation est également un film sur l’art de faire la cuisine, le plaisir des saveurs et celui des créateurs… ?
Oui, les cuisiniers, les chefs, sont des créateurs. Le goût est l’expression d’une sensualité immédiate, le point de départ d’un élan créatif. Saveurs et équilibre, composition, émotion.
Créer, c’est chercher, et chercher encore. D’où vient le talent ? Comment se transmet-il ? Avoir du talent, c’est aussi une destinée. On s’y engage ou pas. Là est toute l’histoire de Clara.
Comment Clovis Cornillac s’est-il imposé dans la blouse du chef ?
Cela faisait longtemps que j’avais envie de travailler avec lui. Clovis a une qualité que j’aime beaucoup : il est metteur en scène. Et parce qu’il connaît la charge que nous avons sur les épaules, il est toujours au soutien. Sur le plateau, il était en confiance et se montrait toujours très disponible pour ses partenaires et l’équipe technique.
Comment Julia de Nunez est-elle devenue votre Clara ?
Je l’avais vue dans la série Bardot et malgré le rôle complexe qu’elle avait à incarner, son naturel m’a plu immédiatement. Julia est aussi une personnalité changeante qui peut passer d’un extrême à l’autre. Or c’était intéressant pour illustrer plusieurs états et moments de la vie de Clara. Elle se fondait parfaitement dans l’univers de la cuisine tout en restant à cette frontière intéressante où se trouve le personnage au début : elle est encore dans l’adolescence et ne veut pas spécialement en sortir. Deux ans plus tard, lorsqu’on la retrouve en Asie, ce n’est plus la même femme.
Avez-vous tout de suite pensé à Julien de Saint Jean pour incarner Antoine ?
À l’origine, cela devait être un homme plus âgé. Mais après avoir vu Arrête avec tes mensonges et Le Paradis, j’ai eu envie de rencontrer Julien. Moins de 48 heures après, il signait pour le film, et j’en suis ravi. Ce rajeunissement a modifié l’équilibre de leur couple, ils sont à égalité, et j’ai ressenti à quel point l’émotion serait plus forte de les voir, si jeunes, face à un drame qui fracasse leurs existences.