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Sous le soleil de Sicile, Oscar récupère de la ferraille avec son père. A l’autre bout de la ville, Stanley le Nigérian vivote grâce aux petits travaux donnés par le prêtre de la paroisse.
Tous deux ont le même désir, celui d’une vie meilleure…
Il mio corpo s’inscrit dans une trilogie, tournée en Sicile. Quelle est sa genèse ?
J’étais fasciné depuis toujours par la Sicile et je me suis rendu à Catane où j’ai réalisé en 2013 le premier film de la trilogie, ‘A iucata. Je suis tombé amoureux de l’île ainsi que de sa face cachée. Dans chacun de mes films, je m’intéresse à des personnages marginaux, invisibles aux yeux de la société. J’ai voulu montrer ce monde de laissés pour compte. Pendant que je tournais mon premier film, j’ai été témoin de problèmes liés aux flux migratoires. Dans tous mes documentaires, je me pose la question du point de vue. Comment regarder la réalité de l’immigration de manière inédite ? Je pense qu’à l’époque je n’étais pas assez mur pour parler de ce sujet. Il m’a fallu cheminer intérieurement et artistiquement. Dans mon film suivant, Pescatori di corpi (2016), j’ai testé un dispositif basé sur des histoires parallèles que je reprends dans Il mio corpo. Mais avec ce dernier film, j’ai brouillé davantage la frontière entre le documentaire et la fiction. J’ai toujours travaillé cet aspect dans mes films précédents mais la volonté d’abolir cette limite est plus forte ici. Au départ, je voulais filmer les mines de soufre. Je savais que la Sicile était le premier producteur au monde jusqu’aux années 1970-1980. Sur place, j’ai vu ces mines abandonnées qui sont devenues pour certaines des décharges. En Sicile, le traitement des déchets est un gros problème. Pendant la Seconde Guerre mondiale, c’était la région la plus riche après Turin. Aujourd’hui, il ne reste plus que des vestiges de cette richesse. Les gens sont partis quand les mines ont fermé, entraînant la disparition du seul pôle d’activité. C’est en faisant mes repérages que j’ai rencontré Marco et sa famille. Le métier de ferrailleur est l’un des plus courants pour ceux qui sont restés. Je pensais que Roberto, l’aîné de la fratrie, serait le personnage principal avant qu’Oscar ne s’impose comme celui-là.
Vous filmez deux destins en miroir :
pourquoi mettre en parallèle ces deux personnages ?
Ce dispositif représentait une prise de risque du début jusqu’à la fin du film. Je n’avais pas prévu initialement d’avoir un second personnage. La famille de Marco constituait déjà une matière riche et j’avais décidé de me concentrer uniquement sur elle. Mais en plus des mines, j’ai découvert que cette île abritait l’un des plus grands centres pour migrants d’Europe. Ce qui m’a frappé, c’est que ce lieu est comme une mine, ce qui me ramenait à mon sujet d’origine. Ce centre se situe au milieu de nulle part. Les résidents font du stop pour rejoindre les villes d’à côté villes d’à côté quand ils ne volent pas des vélos. Je me suis dit que ce
serait bien que j’intègre une autre histoire et en prospectant, je suis tombé sur Stanley qui travaillait à l’église. Son statut de migrant est relativement privilégié car il possède un permis de travail et un titre de séjour. En tournant le film, nous nous sommes rendus compte qu’Oscar et Stanley avaient des désirs similaires. Ils éprouvaient tous deux le même malaise. J’ai commencé à construire ces deux histoires parallèles sans que mes protagonistes en soient avisés. Je les ai suivis en alternance, un jour sur deux. Je ne savais pas encore quelle forme allait prendre le film, étant donné que je ne regarde le matériel qu’au moment du dérushage.
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