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Bastien a vingt ans et milite depuis cinq ans dans le principal parti d’extrême-droite. Quand débute la campagne présidentielle, il est invité par son supérieur à s’engager davantage. Initié à l’art d’endosser le costume des politiciens, il se prend à rêver d’une carrière, mais de vieux démons resurgissent…
Après La Sociologue et l’ourson, comment vous est venue l’idée de La Cravate ?
Étienne Chaillou : L’envie de filmer des jeunes politiques est née pendant les tournages à l’Assemblée nationale pour La Sociologue et l’ourson. Nous croisions au café de l’Assemblée des jeunes de vingt ans, habillés en costard, parlant déjà comme des vieux routiers de la politique. Nous nous sommes dit qu’il serait intéressant de les suivre. Mathias a ensuite réalisé un film documentaire télévisé pour une collection que je dirigeais, sur des jeunes qui votent pour la première fois. Il a rencontré Bastien à cette occasion, ainsi que d’autres jeunes Amiénois. Après ce projet, il m’a dit que Bastien pouvait grimper dans la hiérarchie du FN et il m’a proposé de réfléchir à un film sur lui. La montée des partis nationalistes est un fait qui nous préoccupe beaucoup.
Comment s’est passée la rencontre avec Bastien ?
Mathias Théry : J’ai téléphoné au Front National de la Jeunesse du Nord, et je leur ai dit que je voulais rencontrer des jeunes militants. Ils m’ont donné des contacts que j’ai vus un par un. À la première rencontre avec Bastien, nous l’avons trouvé d’aspect un peu caricatural, en blouson de cuir et cheveux ras, et complètement fasciné par Marine Le Pen, dont il avait même un portrait affiché au dessus de son lit. Mais il se montrait très curieux. C’était un jeune qui cherchait à discuter avec des gens qui ne pensent pas comme lui. Il nous disait aussi que sa famille n’était pas politisée, que très peu de ses amis partageaient ses opinions, que certains étaient de gauche, et qu’il était entré au parti par lui-même. Comment s’était-il retrouvé au FN ? C’était un mystère pour nous. Un mystère que nous avons mis deux ans à comprendre.
Avez-vous tout de suite mis au clair avec lui l’idée que vous pouviez tout filmer ?
ÉC : Non, ça s’est fait en deux temps. Pendant le premier tournage, pour la télé, Bastien acceptait bien la caméra, mais il restait dans un rôle de militant. Nous avons décidé ensuite de faire des entretiens non filmés, avec juste un petit micro, et le premier entretien a sans doute été déterminant pour gagner sa confiance. Il nous a convié dans un bar de Beauvais et nous a longuement confié une partie de sa vie qu’il cachait au FN. Et là, nous avons senti qu’il allait accepter de se raconter assez largement et que le projet l’intéressait.
MT : Concernant les enregistrements audio, il y avait un accord entre nous : nous ne les utiliserions pas dans le film. Nous enregistrions car nous voulions conserver ses mots, ses phrases qui nous ont beaucoup aidés à écrire le texte. Dès le départ, nous lui avons dit : « Ce que nous voulons connaître, ce n’est pas uniquement le parti, mais c’est ta vie en général. On veut faire un portrait de toi plus complet ». Nous voulions nous intéresser au processus d’adhésion à ce parti qui nous inquiète. Pourquoi des milliers d’individus qui ne sont certainement pas tous des salauds finissent par se retrouver à hurler ensemble « on est chez nous », et à s’imaginer qu’une Marine Le Pen peut leur ouvrir un monde meilleur ? Comprendre quelle avait été sa vie pour qu’à vingt ans Bastien soit si engagé, quelles étaient les racines de son engagement et quelle place le parti était venu prendre dans sa vie intime. Donc, il était logique qu’on aille le filmer avec ses amis, au Laserquest, dans son appartement, parfois même lorsqu’il dort dans son lit.
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